I. Lorsque demain arrivera
À l'aune des indicateurs standards, l'économie mondiale ne se porte pas aussi mal que la rhétorique le laisse parfois penser. La croissance mondiale, quoique en deçà de ce qu'on pourrait attendre, est comparable à ses moyennes historiques d'avant la crise, et le chômage poursuit sa décrue. Moins rassurant, cependant, est le contexte à long terme, avec son trio de conditions menaçantes : une croissance de la productivité anormalement faible, une dette mondiale historiquement élevée, et une marge de manœuvre extrêmement réduite pour l'action des pouvoirs publics. Le signe le plus patent de ce malaise est la persistance de taux d'intérêt exceptionnellement bas, et encore en recul depuis l'année dernier.
L'année écoulée a vu un début de réalignement des forces qui façonnent l'évolution de l'économie mondiale : en réponse notamment aux perspectives de la politique monétaire américaine, la liquidité mondiale a commencé à se resserrer et le dollar s'est apprécié ; les booms financiers sont arrivés à maturité, voire à un point de retournement dans certaines économies de marché émergentes ; et les prix des produits de base, en particulier du pétrole, ont poursuivi leur chute. Pourtant, à l'échelle mondiale, les prix et les flux de capitaux se sont en partie inversés au premier semestre de cette année, tandis que les vulnérabilités sous-jacentes persistaient.
Il est urgent de rééquilibrer les politiques publiques pour s'orienter vers une expansion plus robuste et durable.Un facteur clé, dans la situation actuelle, est l'incapacité à maîtriser l'enchaînement de phases d'expansion-contraction financière extrêmement dommageables, ainsi que le modèle de croissance alimenté par l'endettement qu'elle a engendré. Il est essentiel de soulager la politique monétaire, qui supporte, depuis beaucoup trop longtemps, une part excessive du fardeau. Cela signifie qu'il faut achever les réformes financières, en utilisant à bon escient la marge budgétaire disponible tout en assurant la viabilité à long terme, et, surtout, accélérer les réformes structurelles. Ces mesures devraient s'inscrire dans une démarche à long terme visant à mettre en place un cadre de stabilité macrofinancière qui parvienne, avec davantage d'efficacité, à maîtriser les cycles financiers. Il est essentiel de maintenir fermement une orientation à long terme. Le monde a grandement besoin de politiques qu'il ne regrettera pas d'avoir adoptées, le jour où demain arrivera.